Ici j’essaye de répondre aux questions qui ont
suivi ma discussion avec Joe Cornish.
Parmi les nombreux commentaires que je l’ai reçu après la publication deMa Discussion Très Inspirante avec Joe Cornish, plusieurs m’ont demandé comment je me serais senti si Joe avait fait une critique négative de mes propres photographies. Au lieu d’essayer d’y répondre en 2 lignes, je me suis dit que cette question méritait peut-être une vidéo sur ce sujet et ainsi ouvrir le débat avec vous tous. Avant de répondre à cette question précise, je voudrais développer le sujet.
Que représentent, pour moi, la Photographie et l’Art en général?
Je crois profondément que l’Art est un moyen, pour nous, êtres humains, de nous exprimer. Certains peuvent être très éloquents, d’autres meilleurs en dessin, la peinture ou même la danse par exemple. Pour ma part, je suis assez pauvre dans ces domaines et j’ai trouvé la Photographie plus adéquate.
Est ce que la perception d’autrui de mon travail et par conséquent de moi, m’importe?
C’est la question à 1 million de dollars et la réponse n’est pas aussi simple que l’on pourrait l’imaginer ou peut-être elle est, mais elle est aussi un peu longue à expliquer.
Si nous partons sur la base que l’Art est un moyen pour nous de communiquer, il est assez évident que nous, artistes, recherchons une certaine attention, ou tout au moins une oreille ou une paire d’yeux. Je pense que l’être humain est conscient de son inévitable mortalité et est de ce fait, obsédé par des questions existentielles telles que: Est-ce que les gens remarqueraient si je n’étais plus là? Quelle trace (s) est ce que je laisserai derrière une fois mort?
Warhol disait que tout le monde voulait ses 15min de gloire. Je ne pense pas qu’il s’agit uniquement de l’idée de célébrité comme les stars de cinéma et de télévision; mais aussi au sein de notre propre communauté. Les questions ci-dessus impliquent une deuxième partie, un témoin de notre propre existence en quelque sorte. Ce n’est pas, “je pense donc je suis” comme disait Descartes, mais je suis parce que vous pouvez me voir, m’entendre ou me toucher. Sans vous, cher témoin, je ne suis pas, ou du moins la preuve de mon existence est nulle.
Quel serait l’intérêt de commencer une conversation avec quelqu’un qui ne voudrait pas nous écouter. Quel gaspillage d’efforts ce serait et parler à soit même ou au mur et le bon chemin vers la folie. Alors est ce que je me soucie de ce que pensent les autres de mon propre travail et donc par conséquent de moi? Je dois admettre que oui, et beaucoup d’ailleurs. Cependant, combien cette prise de conscience et le souci de la perception d’autrui influencent ma création, mon message?
Si je suis honnête, probablement dès le début quand je décide de prendre mon appareil photo pour capturer une scène. Je me plais à penser que la plupart de mes actions ont un but et bien que beaucoup de mes photos ne seront jamais vues par un autre que moi, l’intention initiale est toujours d’offrir quelque chose à mon témoin (car lui seul me renvoie la preuve de mon existence). Dans la réalisation de cette photographie, je reste conscient de mon objectif final, mon message, et cela va dicter mes réglage d’exposition et même mon cadrage. Enfin lors de la post-production lorsque je finalise la photographie, avant et après chaque coups de mon stylet sur la tablette graphique, je me demande constamment si mon message n’est pas trop fort ou trop faible. Cela étant dit, si l’autre influence le format il n’en reste pas moins mon message.
Est ce que toutes les opinions comptent?
Heureusement non, mais elles peuvent blesser néanmoins. Il est évident que l’opinion de ceux que nous aimons et / ou respecte a plus de valeur que celle d’un étranger. Mais la critique demeure essentielle dans la vie. Qu’elle soit constructive ou non d’ailleurs; elle façonne notre caractère d’une manière ou d’une autre et certains pourrait dire qu’elle fait de nous des artistes. À l’ère des médias sociaux, il y a une infinité de concours d’art et de forums sur internet où le message d’un artiste est jugé par des étrangers ou amis virtuels d’où s’en suit des coeurs brisés & des rêves malheureusement parfois détruits.
Même sur le Tom Migot Photography Club (ma communauté sur G+) où les membres postent leur travail pour que la communauté commente de manière collaboratrice, les sentiments se heurtent quelques fois. Pas plus tard que cette semaine, quelqu’un a posté une photo qu’il avait pris et demandait l’opinion des autres membres, à savoir si cette photo transmettait quelque chose d’intéressant. Un des membres a admis qu’il n’arrivait pas à comprendre le message de la photo et a essayé d’expliquer où la narrative de l’oeuvre l’avait perdu. La réponse immédiate de l’artiste était pleine d’émotion car il s’est senti sur le coup incompris, ce commentaire l’avait donc blessé. J’ai essayé d’apporter un peu de clarté impartiale mais je ne suis pas sûr que mon message ait été bien reçu non plus d’ailleurs.
Il y a une règle intrinsèque à la publication qui est bien connue, mais trop souvent oubliée. Peu importe le lieu où on publie, on s’expose forcément à l’opinion publique. Les forums, galeries d’Art et Internet n’ont jamais été destinés à être des lieux où les artistes peuvent/doivent publier tout ce qu’ils produisent. Je considère ces endroits comme la voie publique devant ma maison. Ai-je vraiment envie d’y aller et crier haut et fort tout ce qui me vient à l’esprit? Bien sûr que non. Le cerveau humain est un organe incroyable qui déclenche des pensées à la fréquence de la vitesse de la lumière, mais avouons-le, la quantité rime rarement avec qualité. Il faut apprendre à filtrer. C’est une compétence très importante pour un artiste. Filtrer ses propres pensées afin de se concentrer sur le message principal et filtrer sa production avant l’exposer. Trouver le juste équilibre entre le public et le message va permettre à l’artiste d’atteindre son objectif final: être entendu et donc exister.
Conclusion
Bien que je n’ai rencontré Joe que seulement à deux reprises, son travail m’a profondément inspiré au fil des ans. Je suis sûr que Joe et moi ne sommes pas d’accord sur tout, mais quand il s’agit de la Photographie de paysage, son opinion compte énormément pour moi. S’il avait donné une critique négative sur mes photos, je mentirais en disant que cela ne m’aurait pas touché plus que ça. J’étais à la fois anxieux et curieux de savoir ce qu’il en penserait. Mais ai-je pris un gros risque en lui faisant critiquer mon propre travail, dans une vidéo faite pour l’Internet? Pas vraiment. Soyons honnête, je n’avais pas pris ces clichés au hasard. J’ai puisé dans mon travail deja publié et je savais, ou du moins espérais, qu’ils seraient en concordance avec son approche de la Photographie. Alors, qu’ai-je ressenti à l’écoute de ses critique positives? Vous pourrez penser de moi ce que vous voudrez mais j’étais profondément ému. Ne pensez pas une seconde, que les années d’expérience pourront combler les cratères créés par ma propre incertitude. Régulièrement et pour longtemps encore, je le souhaite, je continue d’entretenir et de chérir ma relation avec le témoin de ma propre existence.
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